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Portrait du libraire Gandilhon Paula, Rougier Swann

Portrait réalisé le 06/04/2017

Portrait de Paula et Swann - L'Hirondaine

Paula Gandilhon et Swann Rougier, les deux libraires de L'Hirondaine à Firminy dans la Loire, reviennent sur le parcours de leur librairie devenue « coopérative ». Une aventure collective, qui a su mobiliser le tissu local pour permettre de sauver et maintenir la dernière librairie indépendante de la Vallée de l'Ondaine. Une initiative locale et solidaire bien enthousiasmante.

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L'Hirondaine

location_on 10 bis rue Benoit Frachon - 42700 Firminy

phone 04 77 56 13 50

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Rencontre avec Paula Gandilhon et Swann Rougier

Pouvez-vous nous présenter en quelques mots votre librairie ?

Intérieur de l'Hirondaine en 2017

Intérieur de la librairie l'Hirondaine en 2017 © Chez mon libraire

Swann Rougier : L'Hirondaine est une librairie généraliste de centre-ville, située dans une petite rue allant de la place du Breuil (la place principale de Firminy) à la place du marché. Si son emplacement est discret, nous comptons beaucoup sur le bouche à oreille pour nous faire connaître et avec l'aide de nos coopérateurs, ça marche !

Depuis 2 ans, votre librairie se présente sous forme de SCIC. Pouvez-vous nous détailler ce nouveau statut ?

Paula Gandilhon : Il y a deux ans, fin 2014, la dernière librairie indépendante de toute la vallée de l’Ondaine allait fermer. Des lecteurs se sont mobilisés, quelques clients très attachés à leur librairie qui ont su susciter très vite l’intérêt d’une centaine de personnes pour réfléchir à une reprise. Ces client·es étaient tous par ailleurs des personnes très engagées dans la vie locale, dans l’économie sociale et solidaire. Leur enthousiasme et leur volonté ont été communicatifs et ils ont su « embarquer » leurs réseaux, ami·es, connaissances dans cette belle aventure collective. Notre librairie est devenue une coopérative d’intérêt collectif (SCIC) en janvier 2015. Aujourd’hui, 514 coopérateur·rices sont impliqué·es via l’achat de parts à 20 €, participant ainsi directement à son capital. Le fonctionnement est proche d’un fonctionnement associatif, avec une Assemblée Générale annuelle qui rassemble tout le monde, et deux entités qui accompagnent les salarié·es dans la gestion et le développement de la librairie : un Comité de Gestion et un Comité d’Appui et d’Orientation.

Swann Rougier : Le niveau d'implication des coopérateur·rices est variable, il va de la prise de parts, à la présence en magasin pour nous aider dans les tâches quotidiennes ou sur la période des fêtes de fin d’année, où leur aide a été indispensable. Il y a un gros travail de formation et de gestion d'équipe, mais nous pouvons compter sur une trentaine de bénévoles très motivé·es et disponibles pour nous aider dans toutes les actions nécessitant des petites mains. Certain·es ont des compétences précises (comptabilité, gestion de fonds, etc.) qui en ont fait des membres indispensables de l'équipe.

Pourquoi et comment vous êtes-vous orienté·es vers cette alternative ?

Paula Gandilhon : La librairie allait fermer. La reprise en coopérative étant la seule solution, avec la mobilisation des lecteur·rices, pour sortir des difficultés financières qui pesaient lourdement sur le projet de reprise. La création de la coopérative a été suivie par la presse locale qui s’est fait l’écho des avancées.

Avez-vous reçu d'autres soutiens, aides, qu'ils soient financiers ou humains ?

Paula Gandilhon : Des partenaires coopérateur·rices ont aussi beaucoup compté, tout particulièrement Les Artisons, une biocoop qui avait l’expérience du montage d’un tel projet en SCIC, ou encore le soutien d’un Club d'Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l'Epargne Solidaire (CIGALE) nous ayant octroyé un prêt. Les compétences des coopérateur·rices en gestion, montage de dossiers de subvention, communication, bricolage, informatique, animation, ont également beaucoup compté ! Par ailleurs, une aide de la Région et de la DRAC nous a permis d’acquérir un logiciel professionnel de librairie.

Quels ont été les impacts sur l'activité de la librairie ? De nouveaux rayons ou nouvelles activités ont-elles vu le jour ?

Intérieur de la librairie l'Hirondaine en 2017

Intérieur de la librairie l'Hirondaine en 2017 © Chez mon libraire

Paula Gandilhon : Beaucoup de nouvelles activités ont vu le jour telles que le « livre suspendu » : une tirelire mise à la disposition des client·es pour offrir des livres à celles et ceux qui y ont peu accès. En partenariat avec des centres sociaux, nous invitons des enfants à un goûter-lecture au magasin, l'après-midi se termine par le choix d'un ouvrage dans le rayon jeunesse ; un beau cadeau offert par nos client·es pour que la librairie soit ouverte à toutes et tous. Une soixantaine d'enfants ont bénéficié de cette opération depuis sa création. Des travailleur·euses bricoleur·euses travaillent par ailleurs à la réalisation d'un « mur fiction » sur mesure pour présenter les romans et optimiser l'espace. Un « perchoir » est à l'étude pour aménager un espace convivial où s'asseoir et prendre une boisson chaude ; sa création a été différée dans l'attente du réaménagement global du local, notre grand projet 2017 !

Swann Rougier : Deux fois par an, nous élargissons les horaires d'ouverture du magasin jusqu'à 22h pour les « Nocturnes de L’Hirondaine » où libraires et client·es présentent leurs coups de cœur. Nous organisons également des « Piaillées », qui sont des moments d'échanges entre lecteur·ices, proche d'un club de lecture, et ouvertes à tous. Nous sommes également régulièrement amené·es à agir hors les murs, lors de salons ou de tables de vente, comme à l'IREIS, lieu de formation proposant des conférences. Ainsi, L’Hirondaine virevolte au gré des rencontres et des partenariats souvent suscités par l’action des coopérateur·ices.

Quel bilan tirez-vous au bout de deux ans ? Comptiez-vous sur ce résultat ?

Paula Gandilhon : Notre librairie a passé un cap, celui de résoudre certains problèmes financiers, d’améliorer les relations avec ses fournisseurs et les délais de commandes, de travailler à sa notoriété. Il nous faut encore améliorer notre trésorerie, augmenter notre capital avec plus de coopérateur·ices, mais les récents résultats sont très encourageants et notre CA a connu une belle progression.

Comment votre clientèle accueille-t-elle ces transformations ?

Espace jeunesse de l'Hirondaine en 2017

Espace jeunesse de l'Hirondaine en 2017 © Chez mon libraire

Swann Rougier : Plutôt positivement ! Leur librairie est toujours là, elle fourmille de projets et de nouvelles propositions. Le départ du libraire « historique », Raphaël, qui est allé vivre dans le Sud de la France, a été un moment délicat à passer. Notre équipe a vite trouvé ses marques et les projets d’animations ne manquent pas.

Des projets futurs ?

Swann Rougier : Nous avons toujours en tête de déménager pour trouver un local plus grand, mais les locaux disponibles ne correspondent pas à notre recherche. Nous privilégions pour l'instant un grand réaménagement. Notre but ? Optimiser le local de 79 m² avec des aménagements sur mesure, des rayonnages pour dégager de l’espace et accueillir de petits événements et ateliers, car le grand chantier de 2017 sera la mise en place de plus d'animations. Nous allons également postuler pour le label LIR (Librairie Indépendante de Référence).

Envisagez-vous toujours le métier de libraire de la même manière ?

Paula Gandilhon : Quand on est libraire, on s'engage pour que la Culture soit accessible à toutes et tous et pour que nos librairies soient de véritables lieux de vie pour notre ville ou notre quartier. C'est d'autant plus vrai quand on est dans la dernière librairie indépendante de tout un secteur. Avoir des centaines de coopérateur·ices et de bénévoles pour nous épauler nous incite à être, en plus de libraires, des médiateur·ices. Tous les jours nous expliquons comment fonctionne le commerce du livre, les enjeux de notre métier, nous décortiquons les activités que nous avons au quotidien… Le mythe du libraire installé dans son fauteuil, à attendre la fin de la journée avec un bouquin, a été éradiqué à Firminy !

Swann Rougier : La pratique du métier ne change pas en elle-même. C’est surtout le rapport aux client·es qui est différent, car dans cette librairie les rôles sont inversés. La librairie appartient à ses lectrices et lecteurs. Le cœur du métier, le service, prend alors tout son sens puisque nous sommes au service de leur magasin, dans une grande colocation de 500 personnes ! C’est véritablement une très belle responsabilité que de venir tous les jours pour faire vivre un projet culturel commun, et, si nous savons que nous avons la chance de faire un métier porteur de sens, ici dans la coopérative, ça n’en est que plus vrai.


Propos recueillis par Chez Mon Libraire – Mars 2017
Article mis à jour en août 2023

L'Hirondaine librairie coopérative
Année de création : 2012
Année de reprise : passage en coopérative en 2015
Surface de vente : 79 m2
Stock avant la reprise : 6 000 références environ
Après la reprise : 8 700 références environ
L'équipe : 2 salariées et 500 coopérateur·rices