Portrait du libraire Valérie Bethaz

Portrait réalisé le 08/09/2020

Portrait de Valérie - Librairie la Cité du vent

Il y a cinq ans, Valérie Bethaz a quitté Lyon pour créer sa librairie au cœur de la cité du vent. Rencontre avec une libraire passionnée.

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Librairie La Cité du vent

location_on 9 rue Marchande - 15100 Saint-Flour

phone 04 71 20 96 58

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Rencontre avec Valérie Berthaz

Comment êtes-vous devenue libraire ?

Le métier de libraire n'a pas tout de suite été une évidence pour moi. J'ai commencé ma vie professionnelle en occupant divers petits emplois, mais rapidement, je me suis rendue compte que j'avais envie de travailler dans le domaine du livre. J'ai eu une première expérience dans un CDI (Centre de Documentation et d'Information), puis j'ai suivi une formation de libraire dispensée par la Chambre de Commerce de Lyon, qui m'a donné l'opportunité de suivre deux stages en librairies. J'ai effectué le premier dans une petite librairie spécialisée jeunesse à Lyon, la librairie A pleine page qui, malheureusement, n'existe plus. Mon second stage s'est déroulé à la librairie Flammarion, à Lyon, où j'ai été embauchée par la suite.

Dans cette librairie, qui a ensuite été rachetée par Privat, puis par Chapitre, j'ai eu l'occasion de travailler dans différents rayons, mais principalement dans le rayon jeunesse. J'ai effectué la plus grande partie de ma carrière dans cette librairie puisque j'y suis restée 18 ans. 

Cette librairie a fermé 2014, comment avez-vous vécu cet épisode ?

Très mal ! Ça a été un vrai traumatisme, surtout compte tenu de mon implication auprès du comité d'entreprise pour lutter contre sa fermeture. Chapitre a fini par fermer et ça a été un moment très douloureux pour tous. J'ai connu de gros moments de doute et de remise en question... Toute cette culture d'entreprise que j'avais acquise, me séparer de mes collègues, laisser cette ambiance derrière moi... C'était une période très difficile. D'ailleurs je fais encore des rêves... Je n'ai pas encore complètement digéré cette épreuve.

Vous avez décidé par la suite de créer votre librairie dans une petite commune d'Auvergne. Un choix ou une opportunité ?

Au début, je m'orientais plus sur une reprise de librairie. J'ai décidé de faire une étude de marché pour savoir où il serait possible de m'implanter et je suis arrivée à Saint-Flour, car il y avait une petite librairie qui était à vendre, pour cause de retraite. Je suis allée la voir, mais j'ai plutôt été déçue parce qu'elle ne correspondait pas à l'idée de ce que je me faisais d'une librairie. Rapidement, je me suis rendue compte que je voulais mettre mon empreinte personnelle, notamment sur l'assortiment de la librairie. Cette librairie a fermé et j'ai décidé de créer ma propre structure à Saint-Flour : la Cité du Vent. Ça s'est passé très vite : la première fois que je suis venue à Saint-Flour c'était en juillet 2015 et la librairie a ouvert ses portes en novembre de la même année.

Pouvez-vous présenter la Cité du Vent en quelques mots ?

La Cité du Vent est une librairie généraliste de 85 m2. Je travaille généralement seule dans cette librairie et je fais parfois appel au GECLA, le Groupement d'Employeurs de la Chaîne du Livre en Auvergne, pour avoir du renfort. Cette année je vais prendre une apprentie, ce sera une première.

Nos atouts sont l’accueil, le conseil, le sourire, la rencontre : en entrant dans ma librairie, c'est ce que mes clients attendent et ils ne le trouvent pas dans de grosses chaînes ou virtuellement. Je suis très à l'écoute du client, ces derniers éprouvent un besoin de parler de leur quotidien, c'est très convivial. Cela fait partie du métier de libraire indépendant et du commerce de proximité en général.

J'organise également des rencontres avec les auteurs. Cela n'était jamais arrivé à Saint-Flour auparavant et les habitants apprécient énormément ces évènements. Depuis la Covid, malheureusement, les animations sont mises entre parenthèses. Prochainement, Marie-Hélène Lafon doit venir, mais je ne sais pas encore dans quelles conditions cela pourra se faire.

Images de la librairie La Cité du Vent 

Avez-vous reçu un bon accueil de la part des Sanflorains ?

Au début, l'accueil était assez mitigé ! Certains clients étaient sur la réserve, car ils n'avaient pas l'habitude d'être conseillés en librairie. Ils étaient donc parfois surpris lorsque je proposais des coups de cœur sur certains livres ! J'ai développé le conseil petit à petit, notamment en jeunesse. Beaucoup ont réalisé qu'il était possible de choisir des livres en fonction des goûts des enfants et qu'il n'y avait pas que les Walt Disney et tous les clichés qu'on retrouve en grandes surfaces ! Progressivement, les clients m'ont fait confiance, ont réalisé qu'on pouvait proposer une autre offre. Depuis, le rayon jeunesse s'est fortement développé grâce aux conseils que j'ai pu prodiguer.

La pratique du métier de libraire est très différente ici par rapport à ce que vous avez connu à Chapitre à Lyon ?

Ce n'est pas du tout le même métier ! Il n'y a rien à voir entre le fait d'être salariée d'une grande librairie, surtout d'un grand groupe, et être gérante seule dans sa propre librairie. Ici, le travail est plus varié car je fais toutes les tâches, de la réception des livres à la gestion de la librairie.

La clientèle est également complètement différente. Nous ne sommes pas sur le même degré d'exigence ni sur les mêmes attentes qu'à Lyon   Ici, les clients sont beaucoup plus sereins et moins pressés de recevoir leurs commandes. Ils sont également plus tolérants, si un livre est épuisé ou s'il prend plus de temps à arriver.

Par contre, j'ai dû faire ma place, montrer qu'il était possible de conseiller des livres. Comme je l'ai dit, peu de clients étaient réceptifs aux conseils au départ. Heureusement, les choses ont évolué et sont complètement différentes aujourd'hui. Chez Chapitre, c'était l'inverse, je faisais énormément de conseil en jeunesse.

La crise sanitaire a touché de plein fouet la filière du livre, quel a été l'impact sur votre librairie ?

La librairie, comme les autres commerces, a été sous le coup d'une fermeture administrative pendant deux mois. J'ai prévenu mes clients de mon positionnement durant la crise : je ne voulais pas ouvrir partiellement pour traiter les commandes, afin d'éviter tout contact durant le confinement. J'ai reçu beaucoup de messages de soutien de la part de mes clients et, à la réouverture, début mai, énormément de commandes. Je me suis vraiment sentie soutenue, j'ai été très touchée. J'avais prévu de faire une fête pour les 5 ans de la librairie, un concert avec quelques groupes musicaux, mais là... je ne sais plus trop ! On fêtera plutôt les six ans l'année prochaine...

Quels conseils pouvez-vous donner aux futurs libraires ?

Pour être libraire, il faut avoir une grande ouverture d'esprit et être à l'écoute. Mais aussi, être un bon gestionnaire ! Être polyvalent, car c'est un métier qui demande d'avoir de nombreuses casquettes. Il faut toujours se rappeler que ce qui a du sens, c'est la satisfaction des clients. L'abnégation, la patience… et la passion aussi.

Être libraire indépendant aujourd'hui est un engagement !
Nous proposons en effet un lieu d’accueil et d'échanges convivial, mais aussi un choix de livres qui nous engage personnellement.


Propos recueillis par Chez Mon Libraire - juillet 2020

La Cité du Vent
Année de création : 2015
Surface de la librairie : 85 m2
Nombre de salariés : 1 gérante